Aujourd’hui, je vous parle de Maken X Another, le manga de Q Hayashida avant (et un peu pendant) le génial Dorohedoro et adapté d’un jeu d’Atlus (avec Kazuma Kaneko au chara-design), c’est parti !
Le manga Maken X Another étant une adaptation, il me semble indispensable de présenter tout d’abord Maken X, le jeu dont il est issu. Ensuite, nous verrons comment Q Hayashida s’en est retrouvée en charge alors qu’elle n’avait pas encore 25 ans et ce qu’elle a réussi à en faire.
C’est un véritable voyage dans le passé qu’il faut effectuer pour replonger dans l’époque de Maken X. Le jeu sort au Japon le 25 novembre 1999 en exclusivité sur Dreamcast et il est conçu par une dream-team dont les noms vont faire flancher certains cœurs en les lisant. Si le trio formé par Koji Okada (producer du jeu), Kazuma Kaneko (art director) et Shoji Meguro (composer) ne vous dit rien, sachez simplement qu’il s’agit -en gros- des papas des fantastiques jeux estampillés Shin Megami Tensei ancienne génération (bien que Meguro ne soit arrivé qu’à partir de Persona, mais ceci est une autre histoire). Année 1999 oblige, nous sommes dans une antédiluvienne ère pré-Shin Megami Tensei 3 : Nocturne, qui ne sortira qu’en 2003. A vrai dire, nous sommes si loin (au siècle passé !) que la Playstation 2 n’existe pas encore dans les foyers, elle ne sera disponible au Japon qu’en mars 2000. La Dreamcast elle-même n’a qu’un an sur le territoire nippon.
Dans les années 90, chez Atlus, on est habitué à faire des RPG, avec (pour ne citer que ceux précédant directement Maken X) Devil Summoner et Devil Summoner — Soul Hackers sur Saturn (respectivement 1995 et 1997), ainsi que le tout premier Persona sur Playstation (1996). En 1997, pendant le développement de Persona 2 : Innocent Sin, Okada et Kaneko sont tentés de se diversifier et de quitter pour un temps les lourdes conséquences qu’occasionne la création d’un RPG. Cela sera un petit projet annexe plus simple et ils vont en profiter pour tenter l’aventure de la 3D grâce à la fameuse prochaine console de SEGA, la Dreamcast. Ledit projet va toutefois gonfler au fur et à mesure et finalement les occuper pendant deux ans. En parallèle, ils produisent également Persona 2 : Eternal Punishment (la suite d’Innocent Sin). C’est au demeurant un certain Katsura Hashino (Persona 3, 4, 5, Catherine) qui occupe le poste de director, pour la toute première fois de sa vie, sur Maken X. Alors que les Persona visent exclusivement le public japonais, avec Maken X les compères veulent atteindre une audience bien plus large. Ils lorgnent vers l’international. Ceci explique le choix de proposer au joueur d’y parcourir les quatre coins de notre monde, et non plus uniquement les quartiers de Tokyo.
Sans surprise avec Okada et Kaneko, ce n’est pas parce qu’ils désirent s’ouvrir à l’Occident qu’ils vont faire comme tout le monde pour autant. Maken X est donc un FPS sur console, sans fusil ni mitraillette (toujours dans l’idée de nous remémorer l’époque, Turok et Goldeneye sont sortis en 1997 et Half-Life en 1998). A la place, on s’y bat à l’arme blanche ou à l’arme… étrange selon les pouvoirs du personnage que l’on incarne. Car oui, un des grands principes de Maken X est de proposer tout un panel varié d’avatars plus bizarres les uns que les autres.
Sans trop rentrer dans les détails, l’histoire se passe dans un futur proche où les USA et la Chine sont sur le point de se déclarer la guerre, tandis que l’Europe s’effondre inéluctablement. Dans un laboratoire de recherche japonais est développé Maken, un être-machine artificiel en forme d’épée, officiellement capable de soigner les maladies mentales (imaginez-le trancher vos problèmes psychiques au sens propre comme au figuré). Cela est entre autres rendu possible grâce à la découverte d’une sorte de monde parallèle, habitat des nos âmes (appelées PSI). Maken est capable d’extraire le PSI d’une personne et de le manipuler, cela s’appelle le “brainjack”. Il va sans dire qu’au lieu de soigner, le but secret de Maken s’avère de contrôler le monde des PSI, puis le monde tout court. Deux factions vont dès lors s’affronter : les Blademasters qui souhaitent sauver les humains et les Sangokai, qui au contraire provoquent des catastrophes “naturelles” en vue de purger la Terre et de ne conserver qu’un petit pourcentage de la population mondiale.
Au milieu de tout cela, nous incarnons tout d’abord Kei Sagami, la fille du directeur du laboratoire de recherche, qui lors d’une attaque des Sangokai va devoir utiliser Maken et sa faculté de “brainjacker” aussi bien les alliés que les ennemis. Comprendre par là que le joueur peut désormais hacker le cerveau d’autres personnages et les choisir comme autant d’avatars. Il est donc possible de jouer une petite quinzaine de protagonistes différents.
Bien qu’à la base, Okada et Kaneko souhaitaient s’éloigner des composantes de leurs jeux habituels, ils n’ont pas pu résister et ont volontairement gardé une de leurs caractéristiques favorites : la liberté pour le joueur de choisir son camp. Le tout bien sûr sans jugement dans une approche non-manichéenne, même si, avouons-le, les Sangokai sont davantage présentés comme des “méchants”. En résulte 7 fins disponibles, un souhait d’Atlus pour pousser à retenter l’aventure plusieurs fois (justifiant sa courte durée de vie, comptez environ 5 heures pour en voir le bout).
Sur le papier, tout cela est formidable, cependant il serait difficile de cacher que Maken X, pour lequel j’ai malgré tout une sincère sympathie, n’est pas “très” réussi. Il n’y a pas grand chose à reprocher au découpage en stages se déroulant à travers les continents, mais point de vue jouabilité, nous sommes en présence d’un jeu très rigide et plutôt répétitif.
Voici un exemple avec le premier niveau du jeu :
La difficulté est au rendez-vous (encore une fois assumée et revendiquée par Atlus) et elle peut aisément devenir un rempart infranchissable, surtout 20 ans plus tard. Du reste, le jeu sort à peine un an après la naissance de la Dreamcast et l’équipe n’est pas expérimentée en jeu 3D. Maken X tente donc de proposer des décors variés, bien que ceux-ci s’avèrent vides, et les modélisations des personnages, sans être totalement mauvaises, ne rendent que trop rarement justice au travail de chara-design de Kazuma Kaneko.
C’est d’ailleurs sur ce point que je me dois de m’arrêter un dernier instant avant de passer au manga. Sur Maken X, Kaneko livre un travail extrêmement original et éclectique, saupoudré d’influences folkloriques. En hommage à l’ouverture du jeu (et du studio) sur le monde, il s’inspire de codes vestimentaires de tous les continents, tout en y ajoutant sa touche cyber-démoniaque. Le principal charme de Maken X prend indéniablement racine ici, tant le style de Kaneko lui confère une atmosphère aussi intrigante qu’étrange. En parlant d’étrange, dans Maken X, l’on peut tout de même affronter le président des USA sur un ring, se battre contre le futur pape au Vatican, dégommer des nazis, voyager en Transylvanie ou… en France, à Lyon !
Lors de la localisation, Okada et Kaneko se rendent aux USA afin de superviser le doublage en anglais. Ce dernier se révèle assez mauvais à mon goût, mais saluons l’effort. Cela ne sera de toute façon pas suffisant pour sauver commercialement le titre, qui sort aux USA et en Europe dans un certain anonymat et légèrement amputé par quelques censures (principalement le retrait des croix gammées et de la nudité). La possibilité d’une suite en cas de succès, évoquée en entretien par les créateurs, tombe à l’eau et aujourd’hui, plus personne (ou presque) ne se souvient de Maken X ou de Maken Shao, son portage-revisite sur Playstation 2.
Après cette très longue introduction, revenons en 1997, à Tokyo. Une jeune femme vient d’avoir 20 ans et rêve depuis des années déjà de devenir mangaka. A vrai dire, elle ne se voit pas vraiment faire autre chose de sa vie. Cette femme, c’est Q Hayashida (dont le véritable nom est un secret).
Sa passion pour le dessin l’a poussée en école d’art, où elle a passé une partie de son temps à dessiner des textures de peau, une véritable obsession, et à sécher certains cours trop conventionnels. Afin d’essayer de se faire repérer, elle décide astucieusement de participer à des concours de courtes histoires en manga. Elle tente notamment sa chance chez Monthly Afternoon (Kôdansha), un magazine seinen et remporte son premier prix avec “Sofa-chan”.
Sofa-chan ne dure que quelques pages, mais l’on sent déjà le tempérament marqué et original de son autrice. Le ton et les personnages sont plutôt punk, le trait un peu sauvage, et pourtant une ambiance sympathique et à tendance bienveillante s’en dégage. Q Hayashida dessine cette histoire à la volée, sans plan, en inventant les cases les unes après les autres dans l’optique de se faire plaisir. Sofa-chan n’est autre que l’esprit d’un sofa, sous la forme d’une jeune femme, dont le but est de se rendre la plus confortable et utile possible pour son occupant. Ce garçon, utilisant le fauteuil comme siège de gaming, est loin de se douter de la conséquence de ses actes lorsqu’il décide d’en changer au profit d’un modèle plus récent ! Telle une fable de yôkai, Sofa-chan présente une héroïne, qui bien que quasiment nue et au service d’un homme, ne s’efface pas du tout face au récit et possède sa propre et forte personnalité.
Sofa-chan permet en prime à Q Hayashida de se faire démarcher par un responsable éditorial de Kôdansha qui lui propose une place dans le magazine Monthly Magazine Z (toujours seinen). Sa mission : adapter le jeu Maken X tout en respectant les designs de Kazuma Kaneko. C’est une aubaine pour cette jeune apprentie mangaka ! La publication commence en janvier 2000 et durera jusqu’en novembre 2001 pour un total de 21 chapitres, regroupés ensuite en 3 tomes (puis 2 tomes lors d’une ultérieure publication sous le nom de Maken X Another Jack en 2008).
En 2000, du haut de ses 23 ans (elle est née en 1977), Q Hayashida a donc une sacrée responsabilité sur les épaules. L’on peut bien évidemment se poser une légitime question : connaissait-elle déjà l’univers de Kaneko et des Megaten au préalable ? La mangaka étant très rare en interview, il n’est pas évident de trouver des réponses. Heureusement, dans le magazine Atom (n°5), elle s’exprime vaguement sur le sujet :
Si l’on comprend bien, elle n’a pu s’intéresser activement aux jeux vidéo qu’après 1997. La réponse reste pour le moins hasardeuse, car le prix Shikisho (avec Sofa-chan) nous amène à la fin 1997, puis en étant large 1998–99. Or, il n’existe à ce moment-là pas de jeu strictement appelé “Megami Tensei” sur Playstation (les remakes de Shin Megami Tensei 1 et 2 sur la console de Sony sortent plus tard, en 2001 et 2002). A l’époque, il n’y a guère que Persona et, dès 1999, Persona 2 Innocent Sin ainsi que le portage de Soul Hackers. Ces derniers peuvent être évidemment réunis sous le terme général de Megaten (c’est à dire appartenant à l’univers des “Megami Tensei”). Dans le même ordre d’idée, Maken X et Soul Calibur ne sont jamais sortis sur Playstation, mais sur Dreamcast. Nous retiendrons que Q Hayashida devait être au moins un peu familière aux designs de Kaneko et aura eu l’occasion et le temps de jouer à Maken X avant de se lancer dans son adaptation.
Les 7 premiers chapitres (correspondants au volume 1 de la première édition) sont d’ailleurs extrêmement fidèles au jeu, en reprenant les 20 premières minutes (très narratives) de celui-ci. Il est néanmoins immédiatement évident que l’on est en présence de quelque chose de différent des adaptations classiques de jeux vidéo. Il n’est pas ici question de sous-estimer ces dernières, simplement de souligner leurs caractères intrinsèques de produits dérivés. Elles vont “adapter”, et par conséquent souvent se plier à l’œuvre maîtresse et y rester fidèle, en évitant de la déloger de son trône. Se plier, ce n’est clairement pas un mot présent dans le vocabulaire de Hayashida. Son style, elle l’a déjà, peu importe son jeune âge, et la contrainte de reprendre les designs originaux de Kaneko ne semble pas représenter un problème. Ce n’est pourtant pas chose aisée, tant Kaneko a une patte particulière et affirmée, forte en goût et intimidante. Et pourtant, comme par une magie démoniaque, Hayashida nous plonge dès les premières planches dans son univers faits de constructions tordues, de textures et de sang, de carrelages noir et blanc et de tableaux sur lesquels sont peints des cerveaux humains. Son trait charbonneux, loin des standards, n’en est évidemment encore qu’à ses prémisses. Pourtant, rétrospectivement, cela reste diablement impressionnant à la vue de sa mince expérience dans le domaine.
En vérité, tout s’explique en y réfléchissant quelques secondes. Hayashida a pris le terme “adaptation” au pied de la lettre : elle a endossé le rôle de Maken et a brainjacké le jeu lui-même ! Il ne lui reste dès lors plus qu’à en modifier le PSI avant de l’expulser sur le papier.
Ceci dit, Maken X Another n’est en général pas très populaire auprès des lecteurs (du moins occidentaux et à ma connaissance) de Hayashida, sa fin abrupte en plein envol et la comparaison avec Dorohedoro ne lui rendant pas service. De même, Maken X n’est jamais dans les favoris des amateurs des jeux Atlus. Et pourtant, malgré leurs gueules cassées et leurs défauts, il est passionnant de voir comment les deux univers artistiques d’Atlus et de Hayashida, à la fois proches (punk, rebelle, sombre) et distincts (la beauté froide de Kaneko versus le trait sale et organique de la dessinatrice), ont donné naissance à ce manga. Bien entendu, lu en tant que stand-alone et sans avoir touché le pendant ludique, le manga perd en clarté et en intérêt. Le carcan des personnages imposés, dont la présence est exigée (il faut que l’on voit le plus de monde possible, même les ennemis lambda, et qu’il y ait des affrontements), ne permet pas à Hayashida de développer un univers inédit et personnel, comme elle le fera dans Dorohedoro. Elle parvient cependant à introduire des phases d’introspection absentes de l’original, ainsi des nouveaux intervenants (comme Dark Kou ou les hommes-ampoules).
Hayashida a également un avantage sur le jeu. Outre sa narration assez molle, celui-ci propose des décors 3D dépouillés, vides, limités par la technologie et sa relative maîtrise. Elle, au contraire, n’a de limites que son imaginaire (… et aussi le temps, n’oublions pas la cadence imposée du chapitre par mois). Un des termes les plus récurrents pour décrire son dessin est “organique” et ce n’est pas un hasard. Elle parvient à insuffler non seulement la vie à ses personnages, mais aussi à ses environnements. Cette fan d’Aliens, le retour, de Junji Ito et de Kazuo Umezu, de Giger, mais sans aucun doute également du Cronenberg des années 80 et de Shin’ya Tsukamoto n’a de plus pas la main légère question détails gore et tripailles.
A partir du chapitre 8, un parti-pris est déclaré. Contrairement au jeu, dans lequel Kei cède quasiment tout de suite sa place aux autres héros et se contente de questionner le joueur en arrière-plan, dans le manga elle conserve son rôle central jusqu’à la fin. Le récit suit plus ou moins fidèlement un des nombreux embranchements du jeu et se concentre sur une autre femme, Fei Shan Lee, la soeur du mentor de Kei. C’est l’occasion ici d’introduire plusieurs Blademasters et certains membres du Sangokai (dits les Hakke), parfois le simple temps d’une vignette. Cela continue jusqu’aux trois derniers chapitres (19 à 21) qui glissent dans la précipitation. Même en ayant retourné le jeu, on n’y comprend plus rien et la conclusion est bâclée. Elle a le mérite de ne pas finir le manga en pleine action sur un cliffhanger éternel, mais ce happy end n’est pas très convaincant.
De toute façon, il aurait été impossible pour Hayashida de tenir plus longtemps sur Maken X Another, car le 30 novembre 2000 commence en parallèle la publication de Dorohedoro, soit moins d’une année après le début de Maken. Elle raconte n’avoir eu un délai que de deux mois pour fournir son premier chapitre, ce qui nous amène à septembre 2000. A la vue du travail fourni sur Dorohedoro dès le départ, il est assez incroyable d’imaginer la masse de travail abattue par la mangaka jusqu’à la fin 2001 (Maken X Another s’arrête en novembre 2001). Dorohedoro va ensuite occuper Q Hayashida pendant 18 ans (!), l’équivalent de presque… la moitié de sa vie !
Sans en être un brouillon, Maken X Another partage quelques points communs avec Dorohedoro. Cela est dû au style et aux thématiques très particulières de Hayashida. L’on peut notamment relever le sens des duos / dualités. Dans Maken, l’utilisation de l’introspection de Kei ou de Fei Shan permet de proposer deux mondes, le réel et un autre plus fantasmagorique où tous les délires visuels sont possibles. Kei se voit progressivement avalée par Maken, avec lequel elle est obligée de fusionner. On remarque également les apparitions régulières de couloirs remplis de portes, de secrets cachés derrière une petite fenêtre / au bout d’une ruelle / au plus profond de soi, d’un sens esthétique de l’horreur (murs capitonnés, cicatrices, pertes de ses membres, body horror, etc.). L’humour un peu déglingué et les dynamiques très attachantes entre les personnages, en contraste avec la monstruosité environnante, sont aussi de la partie. Hayashida dit qu’elle a beaucoup appris pendant la création de Maken X Another, cela est logique, c’est son premier long manga. Si Dorohedoro lui reste sans conteste largement supérieur, il est très amusant de jeter un œil en arrière et de voir le chemin parcouru, d’autant plus dans le contexte limitatif d’une adaptation.
Voici quelques exemples visuels pour le plaisir.
Tout d’abord, Kei, que Hayashida s’approprie sans problème et malmène physiquement beaucoup plus que dans le jeu.
In game, Kei n’est menacée que mentalement par sa fusion avec Maken. Elle est loin de perdre des parties de son corps, voir son costume se déchirer ou acquérir des membres mécaniques à la Tsukamoto comme dans cette version Another.
Maken lui aussi quitte sa forme lisse, très Behelit-ienne (du manga Berserk), et obtient une consistance moins nette et plus charbonnée, jusqu’à prendre une forme humanoïde assez flippante.
Une grande place est laissée aux ennemis du jeu (malheureusement, seulement ceux de la première partie, le manga s’étant terminé bien avant d’avoir pu fournir un panorama complet). Celui qui donne immédiatement le ton est Hakke Andrey, le premier boss du jeu.
Mais il ne vient bien entendu pas seul, ici des ennemis lambda
Les Blademasters ne sont pas tous traités à la même enseigne et ce sont surtout Fei Shan et Kitty qui sont mises en avant (on notera la valorisation (probablement volontaire) des personnages féminins par Hayashida).
Comme dit précédemment, les décors vides prennent une toute autre dimension dans le manga.
Je dois tout de même signaler que Maken X réussit à dépayser le joueur avec les moyens dont il dispose, malgré les limites de son moteur 3D. Le dernier niveau est d’ailleurs plutôt mémorable dans le genre apocalyptique.
On retrouve aussi dans le manga des éléments devenus typiques du style de Hayashida comme l’importance du restaurant / du plaisir de manger, le contraste noir & blanc à l’aide de motifs tranchés, les portes, des personnages décalés, etc.
Les marques sur le visage sont souvent utilisées chez Kaneko, elles s’y impriment dans la peau de manière lisse, alors que chez Hayashida, la texture étant reine, les traces ont du relief, s’allongent comme un tatouage encore sanglant ou coulent sous l’émotion.
Pour finir, Hayashida nous offre des planches en pleine page ambitieuses et de toute beauté, le tout je le rappelle à 23–24 ans et sans assistant-e pour l’aider.
C’est ainsi que se conclut notre voyage dans le passé. Dans un Dreamcast Magazine de 1999, Kazuma Kaneko assure la promo de Maken X et parle d’amour :
Le choix de proposer au joueur la possibilité de s’allier sans jugement au parti qu’il désire, cela est déjà quelque part une preuve d’amour. Un peu comme si tout le monde était invité à la fête, sans a priori. Dans Dorohedoro, manga violent et gore, les lecteurs sont passionnés par les relations charmantes qui unissent ces personnages si monstrueux. C’est sans le doute le point commun ultime entre Maken X et Maken X Another : faire rimer horreur avec amour. All you need is love !
Pour aller plus loin :
- Maken X peut se jouer sur Dreamcast, attention, il faut une certaine dose de motivation pour accepter son grand âge et sa rigidité. Maken Shao existe toujours sur Playstation 2. Malheureusement, après avoir été pendant des années disponible sur Playstation 3 via le PSN, j’ai découvert en le cherchant qu’il avait été, en toute discrétion, retiré ! Vous pouvez le re-télécharger si vous l’aviez acheté à l’époque (comme moi), mais sinon, c’est désormais impossible. Ce n’est pas une grande perte, car oui, je dénonce, je trouve cette version Shao nulle et bien en deçà de l’original. (enfin, ces disparitions ninja, comme celle du jeu PS3 et PS4 Godzilla, sont tout de même peu appréciables)
- Maken X Another n’a jamais été traduit en français, il est par contre sorti en … Allemagne ! Ce qui est d’autant plus étonnant, vu ses références au nazisme. Vous pouvez, si ce n’est déjà fait, vous jeter sur Dorohedoro, bien sorti chez nous celui-là (l’anime est visible sur Netflix). La grande question restant de savoir ENFIN où et quand va arriver Dai Dark, le nouveau manga de Q Hayashida (vite, please).
- Il est amusant de relever avec le recul que ce n’est pas Maken X qui a rendu Atlus populaire en Occident (malgré ses visées internationales), mais bel et bien Persona (3, 4, puis 5), pourtant si centrés sur le Japon ! Comme quoi, rien ne se passe jamais comme prévu !
- Pour plus d’artworks, vous pouvez fouiller ici : https://megamitensei.fandom.com/wiki/Maken_X
- Et pour plus d’interviews génialement traduites, il y a ce coffre rempli de trésors : https://dijehtranslations.wordpress.com/
- Car tous les chemins mènent à Jojo : https://twitter.com/HokutoAndy/status/700448502950694912